GROSSESSES ET FAUSSES COUCHES « Selon les statistiques internationales, 15% des grossesses se terminent par une fausse couche », dixit Pr Charlemagne Ouédraogo

by Votre Santé Magazine

Les fausses couches, parlons-en ! Qu’est-ce que c’est ? Quelles sont leurs causes ? Quelle catégorie de femmes peut faire de fausses couches à répétition ? L’invité de ce mois de votre magazine, Pr titulaire de gynécologie obstétrique et chef du service de gynécologie obstétrique et médecine de la reproduction au CHU de Bogodogo, Charlemagne Ouédraogo, nous parle de ce phénomène. Lisez !

 

Votre Santé : Qu’appelle-ton fausse couche ?

 

Pr Charlemagne : La fausse couche est une perte de la grossesse, c’est-à-dire une interruption prématurée de la grossesse avant 22 semaines, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et avant 28 semaines, selon la pratique courante dans les pays en développement comme le Burkina. Mais en Afrique, de façon globale, nous restons sur l’ancienne définition à savoir les 28 semaines, parce que le plateau technique a du mal à faire survivre un fœtus de moins de 6 mois. Ce qui fait qu’on retient la définition, mais si l’on veut utiliser le langage international, nous parlons de 22 semaines.

 

Qu’est-ce qui peut être à l’origine d’une fausse couche chez une femme ?

 

La fausse couche encore appelée avortement peut avoir plusieurs causes en rapport avec des malformations utérines. Car l’utérus, étant malformé, n’a pas une capacité pour permettre à une grossesse d’évoluer jusqu’à terme. Il y a aussi des causes en rapport avec des infections. N’importe quel type d’infection parasitaire, bactérienne ou virale peut être à l’origine d’une fausse couche. En plus, il y a des causes chromosomiques en rapport avec les anomalies chromosomiques qui peuvent provoquer les fausses couches. Notons aussi les traumatismes, c’est-à-dire que quel qu’en soit le type de traumatisme sur une grossesse jeune qui est en évolution, il peut entraîner une fausse couche tel qu’un accident de la circulation, un coup violent au niveau du bas-ventre d’une femme enceinte. A cela s’ajoutent les causes avec des carences hormonales. Une fausse couche peut être aussi liée aux séquelles d’avortement provoqué clandestin.

 

Y a-t-il une catégorie de femmes qui est plus exposée à faire des fausses couches ?

 

Evidemment. Il y a un profil de femmes sujettes à faire des fausses couches même si toutes les femmes enceintes peuvent  avoir une fausse couche, mais il y en a qui sont plus prédisposées à faire de fausses couches. C’est celles qui ont des anomalies malformatives de l’appareil génital, celles qui présentent des fibromes utérins, celles qui ont des volumineux kystes de l’ovaire et celles qui présentent des grossesses multiples. L’utérus est fait pour accueillir un seul embryon mais d’autres femmes en ont plusieurs et du coup, elles présentent un risque de faire une fausse couche. Il y a celles aussi qui ont des avortements provoqués clandestins avec des séquelles sur l’appareil génital. Selon les statistiques internationales, 15% des grossesses se terminent par une fausse couche. C’est pour dire que même s’il y a une catégorie de femmes destinées à faire de fausses couches, aucune femme n’est à l’abri.

 

Après la survenue d’une fausse couche, est-il possible pour une femme de contracter une autre grossesse les jours qui suivent immédiatement ?

 

Cela n’est pas conseillé. Une femme qui a fait une fausse couche peut, après un mois, tomber enceinte, mais il est plutôt recommandé qu’une femme qui a eu une fausse couche, attende au minimum 6 mois avant de tenter une nouvelle grossesse. Parce que si une nouvelle grossesse survient très tôt, elle peut être à risque de faire une autre fausse couche. C’est pour cela que lorsqu’une femme perd sa grossesse à 3 mois, il est conseillé qu’elle patiente environ 6 mois de sorte à ce que sa future grossesse ne se voie pas encore menacée d’une interruption. Mais beaucoup de femmes qui perdent leur grossesse, sont pressées de retomber enceintes en mettant à l’idée que cela va remplacer celle qui a coulé. Or, une grossesse ne remplace pas une autre, il faut plutôt faire un travail psychologique pour l’accepter.

 

Y a-t-il une différence entre une fausse couche et un avortement ?

 

C’est la même chose, car la fausse couche est une terminologie qui veut dire avortement sur le plan scientifique. Mais l’avortement peut être provoqué comme il peut être aussi spontané et la fausse couche aussi.

 

Quelles sont les conséquences d’une fausse couche ?

 

Tout dépend de ce qui a causé la fausse couche. Si celle-ci est spontanée, en général c’est celle qui se passe sans complication, car c’est l’organisme qui décide de l’éliminer. Donc, il y a très peu de complication à ce niveau. Les complications qui sont observées sont surtout liées aux fausses couches provoquées, c’est-à-dire l’interruption volontaire et clandestine de la grossesse avec des méthodes non recommandées. Les conséquences se situent au niveau psychologique de la femme. Surtout quand la fausse couche est répétitive, la femme est mal vue dans la société. Et au cas où les fausses couches sont répétitives, il est recommandé d’ouvrir une enquête étiologique pour rechercher les causes de ces avortements à répétition afin de prendre des mesures pour permettre à la femme de garder sa grossesse jusqu’à terme.

 

Recevez-vous des femmes qui font des fausses couches de façon fréquente ?

 

Bien sûr. Il y a des femmes qui en font de façon répétée jusqu’à 3 fausses couches. Et face à cela, elles ont fait une enquête étiologique et quand on en trouve la cause, on apporte une solution. La plupart de ces femmes ont des anomalies du col de l’utérus et ont besoin d’un cerclage. Chez d’autres, leur fausse couche est due à la déformation de leur utérus causée par des fibromes qui représentent d’ailleurs une pathologie fréquente en Afrique noire.

 

Par rapport aux années antérieures, pouvez-vous nous situer sur l’état des lieux des fausses couches au Burkina ?

 

Il faut noter que le phénomène de fausse couche n’a pas évolué par rapport aux années précédentes. C’est plutôt la population qui a augmenté et cela aussi se ressent sur les accouchements. Mais, je dirai que le phénomène n’a pas attiré spécialement notre attention. Je pense qu’on doit plutôt s’inquiéter des avortements provoqués clandestins que des fausses couches.

 

D’aucuns disent que la qualité du sperme chez l’homme est aussi une cause de la fausse couche. Que répondez-vous ?

 

C’est absolument vrai. Voilà pourquoi j’ai parlé plus haut de causes chromosomiques, qui peuvent être attenantes à l’homme, à la femme ou aux deux à la fois. Ce qui fait que le problème de conception ne présente pas toutes les caractéristiques pour se développer. Et dans ce cas, le mécanisme synthétique de l’organisme rejette. Et on recommande de faire des analyses pour trouver la solution.

 

Quels conseils pouvez-vous prodiguer aux femmes pour éviter de faire de fausses couches ?

 

Il faut dire aux femmes de ne pas paniquer lorsqu’il y a une fausse couche, parce qu’avoir une fausse couche est déjà la preuve que la grossesse est possible dans le foyer. Et si cette fausse couche arrive, que la femme ne se presse pas pour tomber enceinte. Au besoin, qu’elle attende au moins 6 mois avant de contracter une nouvelle grossesse. Si la fausse couche se répète, c’est souhaitable que la femme consulte un agent de santé spécialiste dans le domaine qui pourra mener une enquête étiologique afin de prendre les mesures qui s’imposent pour qu’elle puisse non seulement concevoir, mais aussi mener sa grossesse à terme.

 

Valérie TIANHOUN

 

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