Pr Christian Napon, à propos de la myasthénie   « C’est une maladie très peu connue du public et même mal connue par le personnel soignant »

by Votre Santé Magazine

La myasthénie. Qu’est-ce que c’est ? Une maladie que peu de gens connaissent. Le professeur Christian Napon, neurologue au centre hospitalier universitaire Yalgado Ouédraogo dans cette interview définie cette maladie, ses causes ainsi que les moyens de prévention contre cette maladie. Lisez !

 

Le Pays : Qu’est-ce que la myasthénie ?

 

Pr Napon : La myasthénie est maladie neurologique en rapport une atteinte de la jonction neuro musculaire. Elle se caractérise par une fatigabilité croissante à l'effort physique. 

 

Qu’est-ce qu’une maladie neuromusculaire ?

 

 Une maladie neuro musculaire est une maladie qui concerne soit le nerf périphérique (c'est la neuropathie périphérique), soit la jonction neuro musculaire (la myasthénie), soit le muscle lui-même (la myopathie). 

 

Quelles sont ses causes ?

 

La myasthénie est une maladie auto-immune c'est à dire qu'elle résulte d'une auto-agression de l'organisme par lui-même au travers d'auto anticorps produit par les cellules de défenses (lymphocytes), dirigés contre les récepteurs à l'acétylcholine situés sur la membrane musculaire. Ceci empêche le nerf de communiquer convenablement avec le muscle pour permettre l'exécution d'une contraction du muscle, indispensable lors des mouvements volontaires. 

 

Comment elle se manifeste ?

 

La maladie se manifeste par une fatigue de plus en plus ressentie à l’effort physique  au point qu’en fin de journée le malade est complètement épuisé. Les muscles les plus touchés sont les muscles de la paupière supérieure avec une tendance à la chute de celle-ci. Il y a aussi les muscles masticateurs, les muscles qui permettent d’avaler au point où le patient a du mal à déglutir avec certains aliments ou liquide qui ressortent par les narines. Les muscles des épaules et du bassin sont aussi sollicités à l’origine de difficultés à mouvoir les bras et les jambes ainsi que les muscles du cou entraînant une tendance à la chute vers l’avant de la tête. Ces signes sont fluctuants chez le myasthéniques mais sont accentués par différents facteurs comme certains médicaments (il existe une liste de médicaments contre-indiqués) des maladies intercurrentes associées ou le stress.  

 

Qui peut contracter cette maladie ?

 

Il est difficile de répondre à cette question, on sait cependant que très souvent il s’agit d’une personne jeune de sexe féminin entre 20 et 30 ans qui contracte cette maladie. On retrouve aussi souvent des patients qui cumulent une autre maladie auto-immune comme le lupus érythémateux systémiques ou une maladie thyroïdienne et d’autres affections inflammatoire chroniques d’origine auto-immune. 

 

La myasthénie est-elle connue du grand public ?

 

 Très peu connue et même mal connue par le personnel soignant, du fait de sa rareté mais aussi du fait qu’elle est source de errances diagnostiques les patients sont souvent pris pour des personnes « simulant et/ou paresseuse ». Alors qu’il s’agit véritablement de problème de santé engageant le pronostic fonctionnel voire même vital de celles et ceux qui en souffrent. 

 

La myasthénie est-elle héréditaire ?

 

 La myasthénie n’est pas héréditaire, on peut toutefois retrouver les symptômes de la maladie chez un nouveau-né de mère myasthénique à cause du passage de sang de la mère vers l’enfant ce qui va entraîner également un passage des anticorps anti-récepteurs à l’acétylcholine. Cependant les symptômes sont passagers et mineurs et vont s’estomper au bout de quelques semaines. 

 

Quelles sont ces complications ?

 

 Les complications sont la crise myasthénique favorisées par les facteurs déclenchant comme certains médicaments,  responsables de signes comme les fausses routes répétées lors de la déglutition, une toux inefficace, un encombrement bronchique et des difficultés respiratoires. La deuxième complication est la crise cholinergique due à l’excès de prise de médicaments anticholinestérasiques utilisés pour traiter la myasthénie à l’origine de signes similaires à la crise myasthénique. 

 Est-elle mortelle ? 

Elle peut être mortelle en cas de complication. Et ces complications sont celles cité plus haut. 

 

Peut-on guérir? 

 

Tout dépend de ce qu’on entend par guérison. On peut être en rémission clinique pendant longtemps sans ressentir les symptômes de la maladie pendant un temps plus ou moins long selon les patients mais la myasthénie reste une maladie chronique avec des fluctuations dans son mode évolutif. 

 

 Comment se fait le traitement ? 

 

Le traitement est symptomatique et immunologique, cela veut dire qu’il faut lutter contre les manifestations de la maladie en utilisant des médicaments anticholinestérasiques qui vont améliorer la transmission neuromusculaire mais également utiliser des médicaments immunosuppresseurs qui vont lutter contre l’auto agression des récepteurs à l’acétylcholine. La chirurgie a sa place en cas d’hyperplasie du thymus ou de tumeur du thymus sans oublier la psychothérapie de soutien car les patients sont souvent anxieux, stressés ce qui augmente le risque de crise.

  

 Comment la prévenir ?

 

Il s’agit d’une maladie auto-immune qui survient de façon sporadique sans contexte personnel particulier de santé. On n’a pas les moyens de nos jours d’identifier les raisons d’apparition de la maladie chez l’individu lambda quoiqu’on ait prouvé que certains individus de phénotypes HLA (B8 et DR3) soient lus à même de faire préférentiellement la maladie. Au vu de tout cela il est difficile de dire qu’on peut la prévenir.  

 

Autres choses à ajouter ? 

 

Je voudrais vous remercier pour cet interview qui contribue un tant soit peu à faire sortir cette maladie méconnue de l’ombre. Je voudrais profiter de cette opportunité pour lancer un appel à tous ceux ou toutes celles qui présentent une fatigue inexpliquée au moindre effort physique à ne pas hésiter à consulter surtout si à ceci, ces personnes constatent une chute de leur paupière ou des difficultés à manger ou à déglutir. Aucun signe ne doit être banalisé par le patient ou son entourage pour favoriser ainsi le diagnostic et  la prise en charge précoces des cas éventuels de myasthénie. Je vous remercie.

 

Valérie TIANHOUN

 

 

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